Bruit au travail : pourquoi et comment mesurer les risques d’exposition ?
En France, 59 % des actifs, soit plus de 15 millions de personnes, se plaignent du bruit au travail. C'est ce que révèle une enquête IFOP réalisée pour l'association Journée nationale de l'audition. Un chiffre en hausse, avec 7 points de plus en un an, de 2017 à 2018.
On peut réellement parler de problème de santé publique, car les nuisances sonores ont un impact réel sur la santé des travailleurs au quotidien.
Afin d’évaluer les risques d’exposition au bruit dans le cadre professionnel, en vue de préserver l'ouïe de ses salariés, chaque entreprise peut recourir à différents équipements de mesure des niveaux de nuisances sonores.
Mais avant de vous présenter ces différents appareils, nous allons tout d'abord aborder les principes généraux d'une démarche de prévention dont la mise en œuvre est obligatoire pour tout employeur (article L/4121-2 du Code du travail).
Les actions de prévention des risques liés au bruit
Afin de préserver l'ouïe des employés exposés à des niveaux de bruit élevé sur leur lieu de travail, la réglementation française impose à chaque entreprise la mise en oeuvre des mesures suivantes :
- Éviter les risques autant que possible, en privilégiant la sécurité des travailleurs.
- Évaluer les risques qui ne peuvent être évités, grâce à un mesurage des niveaux de bruit auquel les travailleurs sont exposés.
- Supprimer les risques à la source, ou bien les réduire au minimum en tenant compte de l'évolution de la technologie.
- Prendre des mesures de protection collective (adoption de machines silencieuses, insonorisation des locaux, etc.), en leur donnant la priorité sur les mesures de protection individuelle.
Le Ministère de la Santé recommande en outre aux travailleurs exposés aux bruits de prendre des temps de repos auditifs de 30 minutes toutes les 2 heures ou 10 minutes toutes les 45 minutes.
Il est enfin conseillé de consulter et faire participer les travailleurs dans l'évaluation des risques, dans les mesures de réduction, et le choix de protecteurs individuels contre le bruit ou PICB (casques anti-bruit ou bouchons d'oreilles).
À savoir : le danger, qui doit déclencher les premières actions de prévention, commence à 80 décibels pour une journée de travail de 8 h, ce qui est équivalent à une exposition de 1 h à 89 décibels. Le seuil de la douleur est situé aux alentours de 120 décibels. La valeur limite d'exposition, à ne pas dépasser en aucun cas, est fixée à 140 décibels (équivalent à 87 décibels pendant 8 h).
La mesure du bruit au travail
Avant de pouvoir mettre en place les mesures adéquates de protection auditive de leurs salariés, les entreprises doivent tout d'abord identifier chaque poste de travail soumis à des bruits excessifs.
Elles peuvent pour cela recourir à des équipements de mesure de la pression acoustique et du niveau sonore.
Parmi les principaux appareils de mesure du bruit au travail les plus courants figurent :
- L’audiodosimètre, aussi appelé dosimètre ou exposimètre : cet équipement autonome, qui convient à un travailleur très mobile, se porte à la ceinture en permanence, durant une journée de travail. Il se compose d'un boîtier et d'un microphone placé le plus près possible de l’oreille du travailleur. Les résultats sont exprimés en pourcentage de l'exposition maximale permise, ou bien sous forme de niveau d'exposition au bruit, Lex,T.
- Le sonomètre (ou décibelmètre) : il est destiné à mesurer le niveau de pression acoustique, autrement dit le niveau de bruit en décibels, à un moment donné et dans un local particulier. Le sonomètre se compose d'un microphone, de circuits électroniques et d'un affichage.
- Le sonomètre intégrateur : il ressemble à un audiodosimètre, mais est plus précis. Son microphone de mesure doit être maintenu à moins de 40 centimètres de la tête du travailleur.
Ces d’équipements visent une protection de chaque travailleur contre le risque de surdité par traumatisme sonore.
Les mesurages d'exposition doivent être effectués selon les prescriptions de la norme internationale NF EN ISO 9612, en vigueur en Europe.
Notons que l'évaluation du risque bruit est du ressort de l'employeur. Si le mesurage est effectué suite à une demande de l'inspection du travail, l'entreprise est alors tenue de faire appel à un organisme accrédité par le comité français d'accréditation (COFRAC).
Les causes du bruit au travail
Les principaux bruits mis en cause sont tout d'abord ceux liés à l'utilisation d'outils ou de machines, notamment dans les secteurs de l'industrie et du BTP. Les salariés y étant exposés à des intensités sonores très élevées.
Mais d'autres lieux professionnels (centres d'appels, open spaces, radios, etc.) où l'utilisation de casques est courante au quotidien ne sont pas non plus épargnés.
Pour plus d’informations à propos des causes du bruit au travail, cliquer ici.
Les conséquences de l’exposition aux bruits
Les risques liés au bruit au travail sont d’ordre sanitaire, social et économique.
Les effets du bruit sur la santé des travailleurs
Le bruit dans le cadre professionnel peut avoir de lourdes conséquences sur l'état de santé des travailleurs. Cependant, tout va dépendre de l'intensité sonore à laquelle ils sont exposés :
- Exposition à un niveau sonore très élevé : sans protection ni mesures de protection adaptées, il y a de fortes probabilités d'apparition de troubles de l'audition (surdité ou acouphènes) accompagné ou non de troubles de l'équilibre, car le bruit endommage l'oreille interne qui contient l'organe de l'audition, mais également celui de l'équilibre.
- Exposition à un niveau sonore moins élevé, mais sur de plus longues durées : dans ce cas, les conséquences du bruit au travail se manifestent plutôt sous forme de fatigue nerveuse et/ou physique. Une telle fatigue a des conséquences sur le comportement au travail et la qualité du travail.
Des pertes économiques conséquentes
Source de perturbations et de fatigue, le bruit en milieu professionnel entraîne chez les travailleurs :
- Une perte de concentration.
- Un état de nervosité accrue.
- Une baisse de productivité.
- Une baisse de satisfaction au travail.
Par ailleurs, le bruit, parce qu’il masque les signaux d'alerte et détourne l'attention des travailleurs, provoque chaque année de nombreux accidents professionnels, dont le coût social est estimé à 1,1 milliard d'euros.
Mais comme nous l'avons vu plus haut, les bruits traumatiques peuvent également provoquer des troubles auditifs durables, de type acouphène ou surdité.
Sur ce dernier point, le Régime général de la Sécurité Sociale reconnaît chaque année plus de 1000 nouveaux cas de surdités au titre des maladies professionnelles. Le coût total d’indemnisation des surdités professionnelles par les entreprises, via l’Assurance Maladie-Risques Professionnels, étant estimé à plus de 100 millions d’euros par an.
D’après les chiffres sur le bruit au travail fournis par l'ADEME (Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie), les accidents du travail et la surdité provoqués par le bruit coûtent chaque année quelque 1,2 milliard d'euros.
Bref, le coût du bruit au travail, en raison des dommages et des pertes économiques que ces nuisances sonores engendrent, est considérable.
À savoir : pour être reconnue en tant que maladie professionnelle, la surdité doit répondre à plusieurs critères figurant dans le tableau des maladies professionnelles N° 42 du régime général ou dans le tableau N° 46 du régime agricole, sur les atteintes auditives provoquées par les bruits lésionnels.